« Forcément, c’est frustrant de ne pas voter pour le lauréat. On aurait aimé aussi donner notre avis », regrettent les élèves du lycée Pierre-Mendès-France. Mais à l’annonce des résultats, ils ont le sourire. S’adapter, de Clara Dupont-Monod, qui remporte le 34e prix Goncourt des lycéens, était l’un de leurs livres préférés. « On est super contents ! »
Certains élèves de la classe avaient même rencontré Clara Dupont-Monod, déjà lauréate du prix Femina. « Elle était très détendue, disponible malgré un emploi du temps très chargé, se souvient Élise. On l’avait questionnée sur la composition du roman, les trois chapitres, le fait qu’elle ne donne pas de nom au personnage central, sa réaction au prix Femina. » « Elle nous a dit qu’on avait de bonnes questions, pertinentes », ajoute Morgane. Laurent Urnauer, leur enseignant, grand habitué du Goncourt des lycéens, confirme : « Les élèves ont lu les livres de manière très attentionnée, préparé des questions. Et les auteurs aiment leur regard neuf de jeunes lecteurs. »
Impliqués dans le Goncourt des lycéens pour piloter le journal de bord, les 31 élèves de 1re du lycée Pierre-Mendès-France, avec les élèves du lycée Ernest-Renan de Saint-Brieuc, n’ont pas chômé. Lecture des quatorze romans de la sélection, réception des critiques rédigées par les 2 000 élèves des classes Goncourt, des photos, affiches, vidéos envoyées des quatre coins de la France, et même de Guadeloupe… Et donc Interview des auteurs de passage à Rennes… « Au début, on était enthousiastes, puis on a eu un peu peur quand on a su qu’il y avait quatorze romans à lire chacun. Mais on a pu se les partager. Et rencontrer les auteurs en vrai, c’est très motivant. » Clara Dupont-Monod, mais aussi Lilia Hassaine, Elsa Fottorino… « C’est stressant, mais on a pu leur poser des questions et avoir des réponses qu’on ne trouve ni dans les livres, ni dans les articles ! »
« Pas de sujets tabous »
Noé a lui interviewé Mohamed Mbougar Sarr, deux jours seulement avant qu’il soit proclamé lauréat du Prix Goncourt 2021 : « C’était impressionnant. Je me doutais que ce serait lui. J’étais très ému en refermant son livre. Il aborde beaucoup de thèmes, les guerres mondiales, la colonisation, la Shoah, il nous fait voyager en Argentine, à Amsterdam, en Afrique… »
Les élèves ont été touchés, par les sujets abordés, « souvent difficiles » parfois intimes : viol, abus de pouvoir, guerre, antisémitisme, inceste, handicap… « D’habitude, je lisais surtout des mangas, explique Lauriane. Là, j’ai découvert des sujets réels, et des situations qui existent dans le monde entier. » Sofia, Colombienne, arrivée en France il y a deux ans, s’est emparée des sujets : « J’en ai profité pour améliorer mon français. » « Il n’y a pas de sujets tabous, se félicite Morgane. Je ne savais pas qu’il y avait des femmes combattantes kurdes. Elles sont très courageuses. »
Ilona a été particulièrement bouleversée par le livre Parle tout bas, qui évoque un viol. « Elsa Fottorino, l’autrice m’a émue en évoquant le traumatisme. Elle en avait encore les larmes aux yeux. Ça peut permettre à d’autres jeunes filles de parler, de se libérer. »
Les élèves étaient sans cesse aux aguets : « Tous les jours, on regardait la boîte mail, pour voir les contributions, qu’on mettait en ligne le plus rapidement possible. Et tout en restant objectifs. On n’a rien censuré », insiste Julie. Et ce n’est pas fini, les élèves reporters seront également présents lors des rencontres avec les auteurs, prévues les 9 et 10 décembre, dans le nouvel Antipode à Rennes.